Ecofoot.fr a eu la chance cette semaine de s’entretenir avec Enzo Montrucchio, Directeur France de l’équipementier italien Errea. Au cours de l’interview, nous avons eu l’occasion d’évoquer la stratégie de sponsoring menée par la firme italienne en France tout en abordant les grandes évolutions qui impacteront le marché des équipementiers lors des années à venir. Découvrez comment un acteur comme Errea parvient à lutter aux côtés de mastodontes comme Nike ou Adidas…
M. Montrucchio, pouvez-vous vous présenter aux lecteurs d’Ecofoot.fr ?
Cela fait maintenant près de 30 ans que je travaille chez Errea. J’ai intégré la société en 1988 en m’occupant des accords de sponsoring. A l’époque, nous étions une petite structure donc j’assurais la conclusion de la plupart des contrats de partenariats signés en Europe. Et depuis 15 ans, je suis désormais directeur France du groupe. Je gère l’ensemble des activités d’Errea dans l’Hexagone. Cela comprend le sponsoring, la gestion des commerciaux (équipe de 7 personnes), les opérations de marketing menées avec les clubs sportifs partenaires entre autres.
Pouvez-vous nous décrire les activités d’Errea ?
Errea est un équipementier sportif qui réalise un chiffre d’affaires annuel compris entre 65 et 70 M€. Dans le secteur, nous sommes considérés comme un acteur « artisanal ». Nous fabriquons intégralement tous les produits que nous commercialisons. Il n’y a pas de sous-traitance. Nos unités de production principales sont basées à Parme, en Italie. Mais nous possédons d’autres usines situées en Europe et en Asie. Globalement, Errea emploie environ 2 000 salariés.
La différence avec des grands acteurs comme Adidas ou Nike est que nous possédons encore une filière productive intégralement gérée par notre société. Cela constitue la grande force d’Errea. La maîtrise de nos unités de production nous permet d’être très réactifs pour répondre efficacement aux requêtes formulées par nos clubs partenaires. Pour vous donner un exemple, je viens de recevoir à l’instant un appel d’un dirigeant du club de volley de Tours qui nous demande quelques maillots pour accompagner le recrutement d’un nouveau joueur. Il a besoin des tenues pour samedi et nous n’aurons aucun mal à satisfaire une telle requête dans un délai serré. C’est le service que nous proposons à tous nos clubs partenaires, quel que soit la discipline.
Quels sont les clubs de football actuellement sponsorisés par Errea en France ?
« Nous avons construit une relation solide et fidèle avec le club de Nîmes Olympique »
Comme vous avez pu le remarquer, Errea n’équipe plus qu’un seul club de football professionnel aujourd’hui en France. Il s’agit du Nîmes Olympique, club avec lequel nous avons construit une relation solide et fidèle depuis désormais 15 ans. Cependant, par le passé, nous avions été beaucoup plus présents au sein du football français. Par exemple, nous avons équipé le FC Lorient durant 10 saisons entre 2000 et 2010. Nous nous sommes également occupés du SM Caen ou encore, plus récemment, du FC Nantes jusqu’en 2014.
Avec tous nos partenaires, nous avons démontré notre talent en matière de réactivité. Par exemple, en 2002, nous avons connu deux finales de coupes nationales avec le FC Lorient. En un temps record, nous sommes parvenus à produire et écouler 10 000 maillots spécialement conçus pour ces événements. Avec le SM Caen, nous avons également vécu une finale de Coupe de la Ligue durant notre collaboration. De la même manière, nous avions été en capacité de produire 12 500 maillots en quelques jours pour notre partenaire à l’occasion de cette finale.
Cependant, chez Errea, le football est un sport comme un autre. L’intensification ou la diminution de notre présence au sein du football hexagonal dépend de plusieurs facteurs stratégiques et économiques. Ainsi, lors des dernières années, nous avons plutôt décidé de miser sur d’autres sports. Aujourd’hui, Errea est très actif sur le marché français du volleyball (sponsor de l’équipe de France, 5 équipes masculines dont Tours et 7 équipes féminines), du rugby (USAP, Agen…) et du basket (Dijon, Roanne, Toulon, Saint-Chamond…). En volleyball, nous sommes champions d’Europe et nous avons dernièrement gagné la Ligue Mondiale grâce à l’équipe de France. Nous sommes également champions de France avec le club de Tours. C’est fabuleux pour une marque comme la nôtre !
Si nous incluons tous les sports, la présence sportive d’Errea est très importante en France. Nous couvrons tous les territoires. Après, c’est vrai, concernant le football, nous ne possédons plus qu’un seul partenaire évoluant au niveau professionnel en France. Les données du marché peuvent parfois provoquer un désengagement de notre marque auprès de certaines disciplines sportives car elles coûtent trop cher.
Comment choisissez-vous les équipes sportives que vous souhaitez sponsoriser ?
En premier lieu, nous tenons compte de facteurs propres à Errea. Nous devons définir le sport qui nous intéresse en fonction de la gamme de produits que nous souhaitons promouvoir. Nous prenons également en considération notre implantation géographique afin de couvrir un maximum le territoire français. Nous ne signons jamais deux partenariats dans une même zone de chalandise.
Ensuite, nous évaluons les caractéristiques du partenaire ciblé. Nous faisons une première étude sur son niveau de notoriété et sa force commerciale. Puis nous essayons d’étudier au mieux l’organisation du club ciblé ainsi que son potentiel de développement sportif et commercial. Il faut que nous parvenions au mieux à nous projeter sur un partenariat à long terme. L’allocation des ressources pour faire vivre le partenariat est également un élément clé.
Enfin, je ne vous cache pas que le coût de l’opération est un élément déterminant de la faisabilité d’un partenariat. Nous souhaitons minimiser notre prise de risque avant tout engagement. Avant signature d’un contrat, nous devons calculer précisément les investissements publicitaires et les retombées économiques potentielles. Tout partenariat doit nous apporter un vrai bond en avant en termes de chiffre d’affaires. A la fin de l’année, notre bilan financier doit forcément être excédentaire. Nous ne pouvons pas nous permettre d’accumuler les pertes car nous ne sommes pas affiliés à un grand groupe.
Comment mesurez-vous votre retour sur investissement ?
C’est très simple. Nous observons l’évolution de notre chiffre d’affaires réalisé dans la zone de chalandise du club partenaire. Si nous atteignons nos objectifs, nous renouvelons alors notre collaboration de sponsoring avec l’entité sportive concernée.
Quelles sont les activations mises en place avec le club de Nîmes Olympique pour faire vivre ce partenariat ?
Nous avons construit une relation fidèle et solide avec Nîmes Olympique malgré les problèmes traversés par le club la saison dernière. A l’image de toutes nos collaborations majeures, nous avons dédié une unité de production au club afin de pouvoir répondre à toutes leurs demandes avec beaucoup de réactivité. Cela permet au club de maîtriser totalement son merchandising au fil de la saison.
« Un partenariat n’est jamais statique chez Errea »
Nous essayons également d’événementialiser la stratégie merchandising du club. Lors des périodes de fortes activités commerciales (Noël, matchs à enjeu…), nous essayons de concevoir une nouvelle collection de produits dérivés en adéquation avec les désirs du club. C’est une politique que nous menons avec tous nos partenaires nous apportant une importante visibilité. Par exemple, à l’occasion de sa rencontre face au Stade Français, nous avons conçu un nouveau maillot spécial pour le club de rugby d’Agen. Quand l’USAP évoluait dans le championnat de Top 14, nous confectionnions jusqu’à 14 maillots différents par saison !
Le partenariat mis en place avec Nîmes apporte une grande visibilité à Errea. Outre le maillot, nous sommes présents sur les encarts LED du stade des Costières lors des rencontres à domicile du club. Lors de certaines rencontres, nos équipes commerciales se déplacent au sein d’un grand camion pour pouvoir exposer au mieux notre marque et nos produits aux supporters du club.
Chez Errea, un partenariat n’est jamais statique. Nous définissons un premier plan d’action avec nos partenaires mais il peut bouger en fonction des opportunités et des aléas. Dans le football, comme dans les autres sports d’ailleurs, les résultats sportifs sont importants pour faire vivre au mieux un partenariat. Mais nous nous efforçons à développer un maximum d’actions autour du club partenaire pour optimiser notre communication.
Prévoyez-vous de sponsoriser à l’avenir d’autres clubs de football professionnel français ?
Bien sûr. Nous menons actuellement une réflexion à ce sujet. Je pense, à titre personnel, qu’il y aura de gros changements sur le marché des équipementiers footballistiques lors des saisons à venir liés à l’essor de plus en plus important du « star-système ». Via le développement des supports numériques, l’intérêt du grand public et notamment des jeunes générations est croissant envers les très grands clubs européens au détriment des autres formations.
Ce chambardement qui se met progressivement en place pourrait entraîner un changement de dotation sur le marché des équipementiers auprès des clubs n’appartenant pas à l’élite européenne. La Ligue 2 subit par exemple ce phénomène : il y a 10 ans, les grosses marques du secteur étaient omniprésentes au sein du championnat. Petit à petit, elles désertent la compétition. Mais ces changements pourraient créer de nouvelles opportunités pour Errea au sein du marché du football français dans les années à venir.
Pourquoi participez-vous au Sportem (ndlr : salon du marketing sportif se déroulant au Stade Pierre Mauroy du 21 au 22.03.2016) ?
Les équipes d’Errea participent régulièrement aux salons internationaux sur le marketing sportif depuis plus de 20 ans. C’est toujours très intéressant de dialoguer avec les autres acteurs du milieu et écouter leurs analyses au sujet de l’évolution du secteur. C’est l’occasion de confronter nos analyses et perspectives.
Après, à titre personnel, je possède de très bons rapports avec l’organisateur de cet événement, Christophe Rousseau, avec qui j’ai collaboré plusieurs années concernant la gestion et le développement de la stratégie merchandising du FC Nantes. Même si nous avons arrêté d’équiper le club de Nantes, j’ai conservé des liens étroits avec Christophe et cela me fait toujours plaisir de participer à ses initiatives.
Si vous souhaitez découvrir les produits Errea, n’hésitez pas à vous rendre sur leur site officiel : http://www.errea.it/fr/
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Source photo à la Une : © Errea